Musarder au Musée des Beaux-Arts de Nantes, histoire de rafraîchir le lien avec Picasso.
Picasso et moi.
Une passion.
En classe de dessin, lorsque j'étais au lycée, ma prof Madame Grissolange, s'est exclamé avec force, devant tous les autres, que j'aurai pu être une femme aimée par Picasso, car je ressemblais beaucoup à Jacqueline et cela l'avait frappé. A 16 ans, on est romantique et sa réflexion m'a impressionnée. Alors, j'ai lu, regardé son travail. Son oeuvre immense, pleine de force.
Jacqueline, sa dernière épouse et Picasso.
Photo prise sur le net.
Au Musée des Beaux Arts, je suis restée un moment devant cette toile.
Homme assis à la canne 1971
Picasso peint cette toile alors qu'il a 90 ans, comme un autoportrait.
Des traits de jus de peinture mélangée, prise sur une vieille palette poussiéreuse traînant dans l'atelier. Verdâtre, rosâtre, jaunâtre. Et différents noirs. Le pinceau frotte la toile avec assurance et la charge en un temps record. Il laisse des blancs. Il y a urgence à peindre alors qu'il est encore temps. La main fait le job, libérée de toute contrainte, y compris celle du cerveau.
Le corps rabougri se tasse dans la toile. Un corps sans jambe ni pieds qui ne peut plus aller nulle part. Le bas-ventre est un trou noir - tâche de noir affirmé et net dans le tableau. La canne, objet de soutien du vieillard est la seule à apporter une verticalité puissante, structurante et virile. Mais il n'y a plus que la canne à être assurée ! "Symbole-souvenir" d'une vie de mâle bien remplie. Pourtant, les bras sont encore puissants, les doigts emmêlés plein de vitalité.
Le visage est comme une vieille patate restée trop longtemps dans le garde-manger : il a viré au grisâtre. Le nez s'est escamoté, la bouche est une arabesque d'ombre et une barbe en serpentin se rajoute pour faire christique. Le chapeau de paille vieux, cabossé fait comme une auréole un petit peu dorée, sur un bord. Par contre, les yeux... ah ! les yeux... sont ceux de l'éveillé, ceux de celui qui ne cillera pas devant la mort, ceux des Christ peints depuis des siècles et des siècles. Des yeux en amande avec des pupilles de charbon, des pupilles donnant sur l'immensité de l'Etre.