Un carême sans fin (faim ?).
Depuis un certain temps, je me soumets à la soustraction volontairement et sans limite. Dans un premier temps, elle retire avec mon parfait accord. Puis, il y a quelque chose d'intrigant, d'inattendu qui prend la place, qui s'ajoute. De l'énergie, de l'enthousiasme, de la liberté, de la joie... Je ne saurais dire mais ça apporte de la différence, de la vivacité, du mouvement.
On m'a toujours dit que pour devenir grande et belle, il fallait manger côtelettes et chapons, tartelettes et macarons. Et ne pas oublier le chocolat pour le magnésium... Ça m'est resté longtemps.
Depuis toujours, je me suis méfiée du sucre. Mais, je ne suivais pas mon instinct, attirée par la beauté des gâteaux et l'envie de les faire. En prenant de l'âge, j'ai commencé à somnoler après les repas, avoir des allergies au printemps et avoir un peu de gras sur le bide. J'ai supprimé au quotidien les desserts. Pas uniquement par coquetterie.
J'ai eu aussi des crises d'angoisse déclenchées par le café. Enfin, j'ai mis du temps à comprendre que c'était le café. Out le café.
Le jour où j'ai supprimé le gluten, ma cervelle s'est dégagée. Le casque de métal s'est désintégré. Il a suffit d'une semaine à peine.
Pour les produits laitiers que j'ai laissés de côté, c'est mon nez qui a arrêté de couler.
A la fin de l'hiver, j'ai décidé de frapper un grand coup. Faire mon carême à moi. Je n'ai préparé au quotidien, que des plats de légumes en petite quantité (pour savoir de ce dont on a besoin, il suffit de regarder son poing : c'est la quantité que l'on doit trouver dans l'assiette), des fruits, des graines (un peu) et des céréales (un peu). J'ai évité les mélanges compliqués et inadaptés.
Bien sûr, toutes les peurs, tous les désirs, toutes les hésitations se sont radinées. Des voix parfois insistantes ont hurlé, tempêté. Encore aujourd'hui, elles peuvent montrer le bout de leur nez. Elles ne se gênent pas. Je me demande même si elles vont capituler un jour. Elles ont presque cru gagner avec les chocolats de Pâques. D'un coup, je me suis mise à additionner sous leur insistance. Mais, j'ai repris, vite fait, bien fait, mes soustractions.
Lentilles, betteraves et navets nouveaux.
Hommage spécial à ma fille avec qui j'ai partagé, les difficultés, le stress de l'inconnu et la peur du manque.
Quand je cuisine, je l'entends dire "Mamaaaaaaaaaaan, less is more..."